Journée internationale des infirmières et infirmiers : la lettre que je leur adresse

Aujourd’hui, comme chaque 12 mai, a lieu la Journée Internationale des Infirmières et Infirmiers. C’est l’occasion pour moi de rendre un hommage mérité à celles et ceux qui, par vocation, se sont engagés à donner de leur personne pour notre bien-être et prendre soin de nous dans les moments les plus difficiles, comme les plus heureux. Les infirmiers constituent le socle de notre système de santé, ils sont représentés à tous les étages et dans toutes les spécialités.

Sur ces individus d’exception reposent bien souvent des responsabilités énormes pour lesquelles ils n’ont que peu de reconnaissance, financière ou morale. C’est ainsi qu’un infirmier hospitalier débutant percevra en moyenne un traitement net de 1600€, inférieur de 10% au salaire médian des Français. Le pouvoir d’achat des fonctionnaires hospitaliers, en particulier des infirmiers, s’effondre de manière continue, année après année, dans la plus grande indifférence des autorités. Pas d’étonnement si la tentation d’aller exercer à l’étranger est grande, notamment dans les régions frontalières : le salaire moyen des infirmiers luxembourgeois est deux à cinq fois supérieur à celui de leurs homologues français. Les infirmiers doivent être rémunérés à la hauteur de leurs compétences et de l’importance qu’ils jouent dans notre système de santé.

Alors que la plupart des protocoles de soins reposent sur les infirmiers, la moitié d’entre eux se dit inquiète et insatisfaite de la sécurité et de la qualité des soins offerts aux patients, en raison du manque de moyens alloués à leurs services.
Je déplore l’étranglement financier qui menace l’hôpital public, et je supprimerai la tarification à l’activité qui instaure une logique comptable plutôt qu’humaine dans la gestion hospitalière. Les suppressions de lits ainsi que le non-renouvellement de postes dans la fonction publique hospitalière, pour des raisons budgétaires, nous mènent au moins-disant sanitaire et social et mettent en danger la vie de nos compatriotes.

De cela découle un engorgement des services hospitaliers auquel les infirmiers doivent faire face au quotidien, jusqu’à l’épuisement professionnel, voire à la démission. Les patients également font les frais d’un service public hospitalier trop parcimonieux, et la frustration de certains d’entre eux explose au visage des infirmiers, soldats de première ligne. C’est ainsi qu’à Vénissieux, en août 2015, trois infirmières ont été agressées par un patient qui jugeait l’attente aux urgences trop longue ! Les violences verbales et physiques sont devenues routinières. Aussi la pénibilité des professions de santé doit être reconnue et dédommagée financièrement. Les directions hospitalières doivent réfléchir à une meilleure organisation de leurs structures afin de ne pas faire peser sur le personnel des carences managériales.

Les vagues d’immigration successives que connaît notre pays depuis des décennies fragilisent également l’équilibre et le bon fonctionnement des services hospitaliers, en raison de revendications communautaristes et religieuses en nombre croissant, comme le constate la Fédération Hospitalière de France. Il est consternant de voir aujourd’hui, dans un pays laïc, un soignant agressé par le mari d’une patiente, qui ne souhaite pas que son épouse soit prise en charge par un homme. Les infirmiers sont malheureusement bien souvent en première ligne face à ces revendications insistantes, voire violentes. Le seul commencement de solution apporté jusqu’à présent est le « guide pratique de la laïcité à l’hôpital » de l’Observatoire de la Laïcité, alors que les chefs de service demandent de la fermeté de la part de leur direction. L’État doit garantir aux personnels de santé la protection adéquate face à ces attaques à la laïcité et au bon déroulement des protocoles de soins.

Il me paraît d’importance capitale de recréer un ministère exclusivement dédié à la Santé, qui prenne en charge un travail de réflexion poussé sur l’organisation des structures de soins, la revalorisation des professions de santé et l’élaboration de politiques publiques en adéquation avec l’évolution démographique de notre société. En effet, il est important de noter que le numerus clausus pour l’accès aux études de médecine reste trop bas, mettant en place les conditions d’une véritable pénurie médicale. C’est bien entendu sur les infirmiers que le manque de médecins va peser, par le biais de délégations d’actes et un rôle de plus en plus important dans la prise en charge des patients. Ces compétences supplémentaires doivent valoir reconnaissance universitaire et financière aux infirmiers qui mettront en œuvre ces pratiques avancées, sanctuarisées dans la loi de santé par la création du statut encore flou et méconnu d’infirmier clinicien.

Malgré ces obstacles, les infirmières et infirmiers perpétuent leur engagement à soigner leur prochain avec professionnalisme, patience et bienveillance, comme nous avons pu le constater au lendemain des terribles événements de novembre 2015. C’est pourquoi je souhaite assurer les 650 000 infirmières et infirmiers français de ma plus profonde considération, et leur prie de croire que je ferai en sorte que leur travail soit reconnu à sa juste valeur.

Étant particulièrement préoccupée par ces problématiques, je lancerai dans les jours prochains un nouveau collectif socio-professionnel sur les usagers de la santé.

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