Le sectarisme est l’ennemi de l’intelligence

Il arrive parfois que je reçoive des courriers qui me sidèrent et devant lesquels je me demande s’il faut mettre ce que je lis sur le compte de la bêtise ou du mépris.

Le dernier du genre, c’est la réponse que m’ont faite les organisateurs d’un débat organisé dans le cadre de l’élection présidentielle, et que je retranscris plus bas.

Ce débat a lieu aujourd’hui, mardi 28 février et le thème en est : « Reconquête industrielle : maintenant ou jamais ! » Il est organisé par le Groupe des Fédérations Industrielles, le Mouvement des Entreprises de taille intermédiaire, l’Union des Industries Textiles et la Fédération des Industries Mécaniques.

Vous imaginez que ce thème, sur lequel je tente d’alerter les Français depuis des années et qui est au cœur de mon projet et de mes engagements, ne m’a pas laissée indifférente.

Imaginez donc ma surprise lorsque j’ai reçu l’invitation à ce débat, lancée à de multiples professionnels de l’industrie, dont certains sont nos amis et me l’ont transmise, qui présentait le débat comme une discussion entre les « trois principaux candidats à l’élection présidentielle » (sic), à savoir MM. Macron, Fillon et Hamon ! J’ai donc demandé aux organisateurs comment ils pouvaient avoir omis de m’inviter alors qu’il est évident pour tout le monde que je suis un des principaux candidats à l’élection présidentielle et que mon projet économique est à la fois original par rapport aux autres et parfaitement cohérent et construit.

Voici la réponse ahurissante que m’a fait parvenir M. Grandjean, président de la Fédération des Industries mécaniques (je cite le courriel envoyé à mon directeur de cabinet le 27 février) :

« Nous avons décidé de ne pas convier à cet échange de représentant de partis politiques militant activement en faveur de la dissolution de l’UE, du protectionnisme et de la sortie de l’Euro (FN, FDG, DLR…).

Le débat du 28 Février porte sur le sujet de la fiscalité et de la compétitivité dans le cadre économique actuel, il était donc impossible de débattre de compétitivité avec ceux qui défendent une autre voie que celle du libre-échange. Cette position a été validée par notre conseil d’administration. »

Dans beaucoup d’autres cas, cette étrange disposition à n’inviter à un débat que des gens parfaitement d’accord entre eux m’aurait fait sourire. Mais le sujet est trop grave ici pour prendre ça avec humour. Et j’en tire la conclusion que, pour les européistes ultra-libéraux, MM. Macron, Fillon et Hamon ne sont que les bourgeons d’une même fleur et qu’il s’agit simplement de choisir celui qu’on voudra laisser s’épanouir, sans changer ni la plante elle-même ni les méthodes de jardinage et donc pas non plus le résultat de la culture. Or ce résultat sera mauvais, comme il l’est depuis des décennies, car cette plante est une mauvaise herbe, peu importe la couleur du bourgeon ou sa belle apparence.

Sur le plan démocratique, cette exclusion délibérée pose évidemment un grave problème. Sous prétexte qu’on n’accepte pas des dogmes qui ont largement démontré leur nocivité, voilà qu’on n’a même plus le droit de s’exprimer. Je n’accepte pas qu’on puisse ainsi bafouer les principes essentiels de notre République.

Mais je crois que le pire, c’est le fond du sujet. M. Grandjean explique que le débat porte sur la compétitivité. Il semble donc ignorer que le FMI lui-même a calculé que la France souffrait d’un déficit de compétitivité par rapport à l’Allemagne de 21 points en raison du seul fait que les deux pays partagent la même monnaie : en effet, l’euro est sous-évalué de 15 % pour l’économie allemande et surévalué de 6 % pour l’économie française. L’euro est trop fort pour beaucoup de pays qui l’ont adopté et trop faible pour d’autres, en particulier l’Allemagne. D’ailleurs, Mme Merkel l’a reconnu la semaine dernière. C’est un fait indéniable et cela entraîne de très lourds problèmes de compétitivité et de concurrence déloyale au sein de la zone euro. De très nombreux économistes dont plusieurs prix Nobel ont souligné ce point. Prétendre discuter de compétitivité sans aborder la question de la monnaie unique, sans oser se demander si l’euro est une réussite ou un échec, c’est ôter par avance toute crédibilité au débat. Et c’est pourquoi le rétablissement d’une monnaie nationale est dans mon projet (engagement n°35).

Un graphique permet à lui seul de montrer toute l’importance de la seule question monétaire dans la production industrielle. Le voici. Il montre l’évolution de la production industrielle de plusieurs pays de la zone euro et permet de voir combien la création de l’euro a provoqué une divergence inquiétante entre eux.

Quant au refus de discuter du protectionnisme alors que 2016 a vu le référendum en faveur du Brexit et l’élection de Donald Trump, c’est une volonté délibérée de fermer les yeux sur la marche du monde et une obstination irrationnelle à ne pas voir l’avenir qui se profile. Ce n’est pas rassurant de la part de grands responsables des stratégies industrielles des entreprises françaises. C’est même une véritable inquiétude quand on sait à quoi la France doit s’attendre : on ne peut obstinément vouloir laisser la France désarmée dans la mondialisation.

D’ailleurs, les États-Unis ont toujours eu une attitude plus ou moins protectionniste et la plupart des pays hors de l’Union européenne aussi. La Chine, par exemple, sait profiter de l’ouverture de l’Europe à sa production mais sait très bien se protéger pour rester maîtresse de son économie. Ce refus d’intégrer au débat ne serait-ce que la possibilité de mettre en place un petit peu de protectionnisme montre à quel point l’aveuglement idéologique met en danger ce qui nous reste encore d’industrie.

Enfin, le soutien à l’Union européenne semble indiquer que les industriels ne veulent surtout pas qu’on leur parle du problème des délocalisations d’usines du territoire français vers d’autres pays européens. C’est pourtant un sujet important et d’actualité pour les électeurs comme l’annonce du départ de l’usine rentable Whirpool d’Amiens pour la Pologne le prouve. Et pour y répondre, je propose de mettre en place des protections intelligentes aux frontières pour soutenir la production en France de nos entreprises (engagement n°35). Tout produit issu d’une usine qui aura été délocalisée à l’étranger et qui serait réimporté en France sera affecté d’une taxe de 35 %.

Mais je vous l’avoue, je crois savoir pourquoi on ne m’a pas demandé de parler ou d’envoyer un représentant à ce débat : oui, bien sûr, il y a du sectarisme et de l’idéologie bornée. Il y a surtout, au fond, la panique d’un système en déroute qui n’a plus aucun argument solide à avancer et qui ne sait pas quoi répondre quand la réalité lui prouve qu’il a tort. Alors, en dernier recours, il tente de faire taire tous ceux qui tiennent un discours de vérité.

Peu m’importe. J’ai d’autres moyens de m’exprimer et de faire connaître mon projet au peuple français. Et le peuple français, lui, a encore le pouvoir de déposer le bon bulletin de vote dans l’urne pour choisir un président qui aura à cœur de défendre ses intérêts et non le dogme sacré défini par les technocrates de Bruxelles.

P.S. : voici l’intégralité du courrier envoyé à mon directeur de cabinet :
« Monsieur, 
 
En tant que co-organisateur et hôte de cette matinée dédiée à l’industrie dans le cadre de l’élection présidentielle je me permets de répondre au courriel que vous avez adressé à Vincent Moulin-Wright.
 
Nous avons décidé de ne pas convier à cet échange de représentant de partis politiques militant activement en faveur de la dissolution de l’UE, du protectionnisme et de la sortie de l’Euro (FN, FDG, DLR…).
 
Le débat du 28 Février porte sur le sujet de la fiscalité et de la compétitivité dans le cadre économique actuel, il était donc impossible de débattre de compétitivité avec ceux qui défendent une autre voie que celle du libre échange. Cette position a été validée par notre conseil d’administration.
 
Nous nous félicitions de voir le FN s’intéresser au sujet de l’Industrie, je suis prêt à organiser un débat à un autre moment sur le thème du protectionnisme, de l’UE ou de l’Euro si vous le souhaitiez. L’occasion de confronter la position du FN avec l’expérience concrète d’industriels, dirigeants de PME ou d’ETI.
 
Bien cordialement,
 
Bruno Grandjean
Président
Fédération des Industries Mécaniques »
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